dimanche 28 mars 2010
lundi 25 janvier 2010
L’U.S. Army abandonne sa MULE
La nouvelle était prévisible. Elle s’est dernièrement confirmée. L’armée de terre américaine a décidé de tirer un trait (provisoire?) sur le concept de MULE (pour Multifunction/Utility Logistic & Equipment). La MULE était, en pratique, un prototype de véhicule autonome accompagnateur destiné à suivre le soldat sur le terrain d’opération afin de le soutenir sur le plan logistique. La démarche à l’origine de la MULE était de réduire la charge supportée par le soldat lors de son évolution au sol. Aussi, l’idée avait-elle émergé de lui flanquer… un robot bien encombrant ! Dans le langage “diplomatique” de l’U.S. Army, on préfère indiquer que “the Army concludes the MULE in its current design cannot meet the rapidly changing threats, nor meet the Army’s future mission needs”. Soit.
On notera par ailleurs que l’armée de terre a également décidé de suspendre le projet d’un UAV de type FireScout adapté de la cellule du même nom mise au point par Northrop Grummand dans le cadre de l’U.S. Navy et du Marine Corps.
mercredi 20 janvier 2010
Conférence ce 21 janvier sur le thème “Nanotechnologies et Révolution dans les Affaires Militaires” (Maison des Sciences de l’Homme, 54 Boulevard Raspail à Paris)
Dans le cadre du séminaire pluridisciplinaire dédié aux "Mutations et révolutions militaires" co-organisé par l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) et l'Institut de Recherche Stratégique de l'Ecole Militaire (IRSEM), j’aurai le privilège de donner, ce jeudi 21 janvier (à partir de 17.00) à la Maison des Sciences de l'Homme (54 boulevard Raspail à Paris), une conférence sur le thème "Nanotechnologies et révolution dans les affaires militaires – Entre promesses technologiques et technologies de la promesse".
jeudi 7 janvier 2010
A400M: défaitisme ou bataille des communications?
Décidément, il pourrait devenir risqué de parier sur l’avenir de l’A400M à entendre les propos des différents acteurs impliqués (chacun, d’ailleurs, faisant la sourde oreille aux arguments de ses partenaires dans un ballet de communications qui ne constituera pas, à l’évidence, la solution au problème).
En l’état actuel des choses, une certitude existe : personne veut payer. Classique…Oui mais voilà: dans ce dossier, une chose essentielle est de ne pas avoir la mémoire courte. Dernièrement, plusieurs sorties remarquées des industriels et des Etats clients (notamment la France et l’Allemagne) ont visé à reporter sur l’autre la responsabilité des déboires rencontrés par le programme de transporteur militaire. On peut, certes, comprendre les arguments avancés par les pouvoirs publics. Du côté français, on se dit déterminé à ne pas abandonner le programme mais (et ce “mais” n’indique pas pour autant qu’il s’agisse d’une condition posée!) on se refuse à envisager une prise en charge complète des coûts supplémentaires du programme. Du côté allemand, la posture a le mérite – ou l’inconvénient, c’est selon – d’être encore plus nette : on ne rallonge pas un euro de plus ! Sous-entendu : ce n’est pas au contribuable à payer pour les erreurs de l’industriel. Voilà qui est fort justement intéressant ! Comme dans nombre de programmes militaires de haute capacité technologique, il est très rare que les déboires puissent être imputés à un seul protagoniste. Certes, l’erreur d’EADS aura très certainement été de promettre la construction d’un transporteur militaire sur la base d’une logique de développement d’un transporteur civil. Du côté des Etats clients, l’erreur aura sans doute été de penser qu’une telle prouesse industrielle puisse être réalisée (preuve d’un manque de considération de toutes les spécificités des projets technologiques militaires chez certains des responsables de l’époque). A dire vrai, les Etats clients étaient à l’époque relativement pressés de faire passer le projet A400M dans le cahier des charges de l’OCCAR, qui recevait de la sorte son premier véritable programme majeur postérieur à sa fondation! Un ficelage rapide du contrat initial qui affecte aujourd’hui la survie même du projet pour lequel il était bâti.
Alors, bien sûr, on peut polémiquer sur les chiffres. On peut tergiverser sur les retards accumulés (mais quel programme de cette envergure n’a pas de retard?) et sur ceux qui viendront s’ajouter au calendrier. Ceux qui se plaisent, aujourd’hui, à jouer avec le “sort” à réserver au projet ne doivent pas oublier que tout abandon de l’A400M comportera des incidences qui iront bien au-delà de la dimension industrielle. Cette perspective, si elle devait se confirmer, altérerait l’un des fondements mêmes de la politique de sécurité et de défense commune : l’indépendance et l’autonomie d’action que les Etats européens parviennent progressivement – mais assurément! – à établir.
Galileo : EADS Astrium perd face à OHB
EADS Astrium n’est pas parvenu à remporter le contrat de développement des 14 satellites dans le cadre du programme européen de radionavigation et de datation par satellites Galileo. C’est l’allemand OHB qui se verra attribuer le contrat.
Cet échec est à relativiser dans la mesure où EADS aura, dans les prochains jours et les prochains mois, d’autres chats à fouetter : sauver et renégocier le contrat A400M tout en évitant que les déboires rencontrés par le projet de transporteur militaire n’impacte sur la filière civile de l’avionneur.
Source : Tradingsat.com
mardi 5 janvier 2010
Se dirige-t-on vers l’abandon de l’A400M?
Cela se pourrait. La nouvelle rapportée par le Financial Times Deutschland (et relayée par le journal Le Monde) a de quoi laisser perplexe. Mais pour Thomas Enders, les négociations actuellement en cours entre l’industriel Airbus Military et les Etats clients ne semblent pas, a priori, porteuses d’un accord.
Dans le même temps, il faut raison garder. On sait les péripéties multiples auxquelles peuvent être livrés les programmes technologiques civil ou militaire. Souvenons-nous, à ce titre, de Galileo qui a, finalement, été rapatrié dans son ensemble sous la gestion publique de la Commission! Bien sûr, peu de probabilité pour qu’une solution du même acabit puisse survenir pour sauver l’A400M. C’est cela aussi, une fois de plus, la leçon que nous pouvons retirer des difficultés du programme: l’absence de toute instance européenne permanente susceptible de sauvegarder l’intérêt général européen en matière de défense commune.
Mais attendons tout d’abord ce qu’il ressortira des négociations avant de nous avancer.
mardi 22 décembre 2009
Drone d’histoire !
Petit coup de tonnerre dans la communauté de la défense et des affaires stratégiques en date du 4 décembre dernier : l’U.S. Air Force confirmait officiellement les rumeurs selon lesquelles les forces armées américaines mettaient en oeuvre un nouveau prototype de drone en Afghanistan. Désigné RQ-170 Sentinel, cet appareil ne représente pas une rupture stratégique majeur... pour l’heure. Nénamoins, la confirmation selon laquelle l’U.S. Air Force poursuit bel et bien ses efforts de développement d’un nouveau système aérien inhabité génère de nouvelles hypothèses sur la stratégie américaine des moyens dans le secteur des plate-formes autonomes.
C’est le site Ares (Aviation Week [1]) qui, en ébruitant l’affaire, semble avoir contraint le Département américain de la Défense (DoD) à faire une sortie pour le moins inhabituelle sur le sujet. En dévoilant, le 4 décembre dernier, l’existence d’un nouveau drone de reconnaissance et de surveillance, le RQ-170 Sentinel, dans les cieux de l’Afghanistan (dans la région de Kandahar, plus précisément), le DoD a été amené à communiquer sur le dernier né des bureaux Skunk Works, unité en charge des projets « noirs » de Lockheed Martin[2].
De cette annonce, une controverse est née qui porte, indifféremment, sur les sous-systèmes embarqués par la plate-forme, sur les missions réelles qui viendraient à être confiées à terme à l’appareil ou, encore, sur les performances du dispositif en matières de furtivité, de charge utile, de rayon d’action et d’autonomie. Tâchons, dès à présent, de nous pencher sur les hypothèses que nous suggèrent l’existence et le dévoilement de ce projet.
Reconnaissance, combat ou bluff ?
Hypothèse numéro 1 : les forces armées des Etats-Unis poursuivent le développement d’un appareil aérien autonome chargé d’assurer la succession des systèmes de reconnaissance et de surveillance actuellement en service (pilotés et non-pilotés). Depuis plusieurs années, en effet, les forces U.S. investissent dans la mise au point d’un senseur aérien high-tech (désigné Sensorcraft), appelé à intégrer en une seule et unique cellule l’ensemble des moyens existants d’imagerie, d’écoute et de reconnaissance. Le Sensorcraft a pour but d’accueillir une multiplicité de capteurs sophistiqués comprenant, entre autres, l’imagerie hyperspectrale ou encore des radars pour la détection de cibles sous couvert de végétation. Un article de la revue professionnelle C4ISR du mois d’août 2007 constatait que les bureaux Skunk Works semblaient avoir atteint le niveau le plus avancé de conception d’un tel prototype. Ceci en comparaison des efforts déployés par Boeing et Northrop Grumman sur ce même segment[3]. Devons-nous voir dans le RQ-170 Sentinel une première ébauche de ce système ? Probable.
Hypothèse numéro 2 : l’existence du RQ-170 prouve que les Etats-Unis poursuivent leurs efforts en vue du développement d’un système de combat aérien autonome ; l’allure du RQ-170 laissant, a priori, supposer la possibilité d’un emport de munitions en soutes. Le fait que l’appareil photographié soit, pour l’heure, limité à des vols de reconnaissance et de surveillance, ne préjuge en rien des évolutions futures possibles d’un tel prototype qui tendraient, dès lors, vers le développement de drones de combat. Par le passé, l’U.S. Air Force, l’U.S. Navy et la DARPA (Defense Advanced Research Project Agency) avaient conduit un programme conjoint de démonstrateur technologique de drone/senseur de combat, dénommé J-UCAS (pour Joint Unmanned Combat Aerial System). Né de la fusion de deux projets démarrés sur fonds propres par les industriels Boeing (X-45) et Northrop Grumman (X-47), le J-UCAS réunissait l’USAF et l’USN autour d’un programme de développement commun, destiné à tester la faisabilité et l’utilité d’une architecture réseaucentrée de combat dans laquelle les cellules aériennes autonomes étaient appelées à constituer les chevilles ouvrières.
En février 2006, le DoD choisit de mettre un terme au programme J-UCAS afin de le réorienter vers un projet de recherche destiné à concevoir un futur bombardier à long rayon d’action. Au vrai, les véritables raisons de l’abandon du programme étaient à trouver ailleurs. Parmi elles, on pouvait citer les rivalités interservices quant aux spécifications techniques des prototypes, l’absence d’une vision commune de développement entre les services ou encore l’extension immodérée des besoins formulés par l’USAF et l’USN à l’endroit des systèmes. Avec comme corolaire, des dépassements de délais et de coûts laissant craindre que la mise en œuvre de tels drones ne présente aucun avantage comparatif par rapport aux plates-formes de combat pilotées de nouvelle génération (F-22 et F-35).
Pour autant, l’abandon du J-UCAS n’a pas mis fin au développement des sous-systèmes technologiques dont il a accouché. Aussi, dans le courant 2007, l’U.S. Navy a-t’elle confirmé son intention de relancer en propre le défunt projet dans le cadre du programme UCAS-N en visant, notamment, la conception d’un système aérien autonome pouvant opérer depuis ses porte-avions.
Le RQ-170 Sentinel est, pour sa part, développé par Lockheed Martin. Au travers de ce nouveau système aérien autonome, Lockheed Martin pourrait réitérer sa tentative de reprendre la main face à ses concurrents que sont Boeing et Northrop Grumman.
Hypothèse numéro 3 : le dévoilement du RQ-170 se situe au cœur d’une vaste opération de communication et de guerre psychologique principalement à l’adresse de l’Iran voisin. Cette hypothèse est loin d’être négligeable et s’appuie sur des précédents. Il faut ici rappeler que l’exemplaire du RQ-170, surpris à son décollage, a été photographié à… l’aéroport international de Kandahar ! Chacun en conviendra : il est des lieux bien plus appropriés pour conserver des projets de systèmes d’armes dans l’anonymat. Le RQ-170 aurait-il donc été volontairement exposé par les forces armées des Etats-Unis ? Le dévoilement du projet est-il destiné à faire pression sur le régime iranien ou sur tout autre compétiteur potentiel ? Rien ne doit être exclu.
Evolution ou rupture ?
À l’évidence, l’existence officielle du RQ-170 Sentinel nous confirme la volonté affichée par les Etats-Unis de poursuivre le développement d’une forme de combat désengagé (ou sans engagement), quoi que peuvent laisser supposer les dernières décisions de l’Administration Obama. Notons que la revue de posture globale (RPG) des Etats-Unis, adoptée en 2004 sous la Présidence Bush, n’a pas été désavouée par l’actuelle Administration. La RPG peut raisonnablement laisser supposer que la conception de senseurs de combat autonomes avec un niveau de prise de risque humain minimal s’avère essentiel pour compenser la contraction graduelle des bases militaires déployées outre-mer.
Le dévoilement (intentionnel ?) du programme RQ-170 ne doit cependant point nous distraire de la réalité des développements des systèmes d’UAV et d’UCAV aux Etats-Unis. Bien que la prise de risque, caractéristique de la culture technologique américaine, ait pu aboutir à un certain nombre de ruptures techniques en ces domaines, l’histoire du développement des drones aux Etats-Unis est également parsemée d’échecs. Nombre de programmes ont, en effet, subi les effets d’un manque de rigueur dans la définition des besoins et des spécifications par les services. En d’autres termes, la reconnaissance officielle du RQ-170 confirme davantage un certain nombre de tendances connues qu’elle ne nous informe sur des radicalisations technologiques nouvelles.
[1] http://www.aviationweek.com/aw/blogs/defense/index.jsp.
[2] David A. Fulghum, « USAF Confirms Stealthy UAV Operations », Aviation Week, December 4, 2009, cf. http://www.aviationweek.com/aw/generic/story_generic.jsp?channel=defense&id=news/BEAST120409.xml&headline=USAF%20Confirms%20Stealthy%20UAV%20Operations ;
[3] Paul Richfield, « Lokking Ahead », C4ISR : The Journal of Net-Centric Warfare, Defense News Media Group, volume 6, numéro 7, p. 20.
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