lundi 18 août 2008

Un retrait des troupes russes de Géorgie est-il possible?

On ne le dira jamais assez: les informations que les médias peuvent nous distiller sur la situation en Géorgie laissent pour le moins perplexe sur la réelle résolution de la Russie à tenir les engagements passés avec les puissances occidentales.

Faut-il nécessairement s'étonner des contradictions apparentes entre les discours et les actes. Non. et cela est particulièrement vrai dans le cas de la Russie dont on connaît l'habileté pour tirer parti des opportunités qui s'offrent à elles en matière de politique étrangère. D'ailleurs, la Russie semble être parvenue à signer un document non-identique à celui signé par la Géorgie.

Il est, tout d'abord, intéressant de rappeler que la Russie... ne s'est jamais réellement retirée de Géorgie depuis la fin de la guerre froide. Il est peu fait mention des quatre bases, héritées de l'époque soviétique, que la Russie avait pour obligation de démanteler et rétrocéder au gouvernement géorgien dans le cadre des négociations sur la révision du traité sur les forces conventionnelles en Europe (FCE). Concrètement, deux bases (dont une située dans la périphérie de Tbilissi) avaient été démantelée en 2001. Une troisième l'avait été en 2007 (après de longues et âpres négociations entre 2004 et 2005) tandis que la dernière de ces bases devait être rétrocédée en... 2008. Aussi, on peut légitimement se montrer dubitatif à l'écoute des discours politiques exigeant un retour à la situation ex ante. De quelle situation antérieure parle-t'on exactement? Surtout, la suspension par la Russie, voici un an, de sa participation à la mise en oeuvre des dispositions du traité FCE (échanges d'informations, visites, inspections, envoi d'observateurs dans le cas d'exercices militaires, etc.) laissait d'ores et déjà présager de l'impossibilité pour les Occidentaux de recourir à des moyens juridiques internationaux pour le contrôle des forces conventionnelles en Europe (le plan proposé par Nicolas Sarkozy visait, en quelque sorte, à créer un mini-FCE pour les forces en présence sur le terrain). Théoriquement, donc, la possibilité d'une concentration de forces armées aux frontières d'un Etat (les FCE visaient expressément à l'origine l'Union soviétique que l'on supposait capable de rééditer une nouvelle guerre éclair [blitzkrieg] dans le Centre-Europe) s'avérait donc une hypothèse crédible. Force est de constater que l'opération en Géorgie (indépendamment de l'erreur stratégique de cette dernière) a en tous points illustré les craintes nourries par les états-majors. Cependant, comme toujours dans l'histoire militaire, c'est la vitesse et la précipitation des événements qui est le moins souvent correctement anticipée.

De l'anticipation, justement, il peut également en être question. Certes, le retrait russe des FCE n'autorise plus un recours aux dispositifs prévus par le traité pour le contrôle des manoeuvres russes sur son territoire et aux abords de ses frontières. Soit. Il reste que d'autres moyens existent pour disposer d'une évaluation en temps réel (ou quasi-réel, soyons modestes et lucides) de la situation sur le terrain. Les Etats-Unis à eux seuls disposent d'une panoplie de capacités satellitaires d'observation qui ne devraient, théoriquement, ne laisser aucun équivoque sur l'état des forces dans la région. Bien sûr, l'observation satellitaire a, par le passé, rencontré d'importantes limites. Pour faire court : elles n'ont pas permises, depuis 2001, la capture de Ben-Laden. Il est toutefois difficilement imaginable de penser que la fabuleuse concentration des forces de la 58ème armée russe soit passée inaperçue. Et cependant, elle n'avait pas engendré, à ma connaissance, d'agitations diplomatiques particulières, du moins pas avant l'escalade intervenue dans les hostilités. Faut-il voir là - en dehors des assurances faites à la Géorgie qu'elle a bien "vocation" (sic!) à rentrer dans l'OTAN, une défaillance de la solidarité des Etats-Unis vis-à-vis des Etats qui aspirent à rejoindre, demain, la communauté euro-atlantique. Nous le verrons en décembre.

Je ne peux, enfin, résister à reporter extrait du reportage réalisé par TF1 en Géorgie. Une habitante de Gori disait ne pas comprendre les manoeuvres interminables des véhicules de combat russes... Et si les éléments de la 58ème armée jouaient au chat et à la souris avec les satellites?

Situation inquiétante quoi qu'il en soit. Nous la suivrons encore ces prochains jours.

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