vendredi 26 décembre 2008

Et trois GLONASS… Trois!

glonass-petit On peut, il est vrai, tergiverser sur l’état réel du secteur spatial en Russie (et nous le ferons également), on ne peut, cependant, nier que la récente volonté de redynamiser GLONASS, le système russe de navigation par satellite, porte ses fruits.

En effet, tandis que GALILEO, qui se veut le concurrent européen du GPS américain (et du prochain GPS III), n’en finit pas de successivement sombrer et d’être replacer sur les rails (grâce, notamment, aux économies opérées dans le cadre de la Politique agricole commune), GLONASS poursuit sa revalidation progressive. Ce sont trois nouveaux satellites de navigation qui ont été placés en orbite par un fusée PROTON-M. 20 satellites (re)composent aujourd’hui la constellation GLONASS. Moscou entend finaliser au plus tôt son architecture en orbite qui devrait compter, à terme, un ensemble de 24 satellites.

Ce nouveau tir intervient, faut-il le rappeler, dans un contexte de refinancement global et soutenu du secteur spatial en Russie. La régularité des reversements des excédants financiers russes dans les programmes spatiaux traduit, à l’évidence, la détermination du politique à procéder à une revalorisation général de l’outil spatial. Cette implication forte du politique a, notamment, pris la forme, en 2004, d’une réorganisation drastique de l’Agence spatiale fédérale russe, suivie, un an plus tard (octobre 2005), par la parution d’un nouveau programme spatial russe – peu commenté, au demeurant. Bien sûr, la Russie ne saurait effacer du revers de la main les années Eltsine marquée par une déconsidération des politiques de l’époque à l’égard de la survie de son secteur d’activités spatiales. On ne peut, cependant, que constater que cette période semble bel et bien révolue. Il reste que, en dépit des efforts entrepris depuis 2000, la secteur spatial russe est encore en phase de convalescence.

L’Europe, dont les politiques spatiales* restent marquées par des hésitations, des confusions quand il ne s’agi pas de combats d’arrière-garde (notamment quant à l’emploi du spatial pour des objectifs de défense), semble se contenter de rattraper les trains en marche…

* Parler d’une politique spatiale européenne est, selon moi, un contre-sens dans la mesure où le secteur spatial européen, dans sa dimension institutionnelle, reste marquée par un éclatement regrettable des structures en charge de l’espace. ceci est vrai au sein même de la Commission européenne mais également au niveau intergouvernemental où des synergies manquent cruellement entre l’Agence européenne de défense et l’Agence spatiale européenne. Il reste à espérer que le transfert de certains éléments constitutifs du programme MUSIS vers l’AED et l’OCCAR, ainsi que la récente volonté de jonction des efforts (cf. Workshop on Critical Space Technologies) conduits par l’AED, ASE et la Commission européenne pour le développement des technologies spatiales critiques (sans outre formalisation) puissent constituer els catalyseurs d’une vision plus cohérente.

mercredi 24 décembre 2008

Quelle place pour la Belgique dans le spatial européen?

C’est l’édition de ce mardi 23 décembre de La Libre Belgique qui l’annonce, la Ministre de la Politique scientifique, Sabine Laruelle, entend débloquer une enveloppe de 193 millions d’euros pour les cinq prochaines années au profit du secteur spatial belge. Cette nouvelle est particulièrement rassurante dans un contexte de crise économique doublé – une particularité belge – d’une crise institutionnelle.

Il est vrai que, à l’exception des milieux directement concernés par ce secteur d’activité, peu d’insistance semble habituellement placée sur le rôle spécifique de la Belgique dans le secteur spatial européen. Notre pays y compte pourtant comme l’une des principales chevilles ouvrières. Ceci pour plusieurs raisons.

D’une part, la Belgique a su développer des compétences de pointe dans des niches technologiques très délimitées mais néanmoins stratégiques. Au point qu’un responsable français auprès des instances européennes m’avait précisé, voici quelques mois, que dans ce domaine les Belges avaient su jouer une carte gagnante puisque pratiquement aucun programme spatial majeur de niveau européen ne pouvait se faire sans qu’une entreprise belge ne participe à son élaboration.

Une seconde raison qui explique le rang particulier de notre pays dans le paysage européen du spatial tient à la typicité de notre structure institutionnelle et politique. Contrairement à d’autres pays, la Belgique n’a jamais disposé – et n’a jamais souhaité disposer (en tous cas jusqu’il y a peu) – d’une Agence spatiale “fédérale”; l’Agence spatiale européenne étant censée jouer ce rôle pour notre pays. L’orientation de notre politique spatiale est donc “résolument” européenne; ce qui a pour mérite d’éviter bien des tergiversations sur les finalités politiques des programmes auxquels nous participons. Surtout, la focalisation sur l’objectif européen permet à nos instances de dépasser les querelles communautaires qui si elles devaient “polluer” le débat spatial dans notre pays viendraient à impacter sur notre aptitude à nous positionner comme acteur européen incontournable.

Ceci étant, le tissu spatial belge comporte quelques faiblesse et reste soumis à des interrogations quant à son avenir à long terme. On peut, ainsi, s’interroger sur la viabilité à long terme d’un cadre institutionnel qui, bien qu’il soit parvenu à assurer la continuité de la politique spatiale de notre pays dans les grandes enceintes, peut, à tout instant, risquer de sombrer dans des fractures socio-politiques qui, à dire vrai, n’ont que peu ou prou de rapport avec le domaine spatial. En effet, la politique spatiale de la Belgique est basée sur une fragile équilibre (qui semble tout de même avoir fait ses preuves) découlant de la loi spéciale de réforme institutionnelle du 8 août 1980 qui, en substance, indique que même si les compétences dans le domaine de la recherche et des sciences relève des communautés et des régions, les secteur spatial est, pour sa part, dépendant du fédéral; un gage d’unité, donc.

Sur le plan industriel, force est de constater que la composition de notre tissu d’entreprises, tant au nord qu’au sud du pays, est tout à fait spécifique et résulte, pour une large part, de l’histoire institutionnelle de notre Etat. Par ailleurs, les industries belges investies dans le domaine spatial n’ont jamais fait de ce terrain d’application un secteur d’activité exclusif compte tenu des coûts de développement et des risques élevés propres à ce type d’activités. Nos industriels rencontrent, enfin, quelques difficultés à faire entendre leurs voix auprès des grands entrepreneurs spatiaux. Toute nouvelle perspective de reconsolidation de la base industrielle et technologique européenne dans le domaine aérospatial est porteuse d’incertitudes. Cela est encore plus vrai pour les entreprises de notre pays.

La Libre Belgique a donc mille fois raisons de faire l’éloge de notre volonté d’investissement dans ce secteur. Ce que le quotidien ne dit pas c’est que cette décision fait suite à de multiples incertitudes qui avaient fini par germé il y a quelques mois au sujet du maintien du rang de la Belgique parmi les contributeurs de l’ESA.

La Belgique a, en effet, manqué de peu d’être reléguée au-delà de la cinquième place qu’elle occupe traditionnellement dans le classement des contributeurs de l’ESA. Un montant de 25 millions d’euros manquait encore tout récemment à l’appel pour combler la différence qui existait alors entre les crédits d’engagement (142 millions d’euros) et les crédits de paiement (117 millions d’euros). La question qui se posait alors était de savoir si les régions accepteraient de contribuer financièrement à combler cette différence. Sans doute, davantage d’informations filtreront-elles dans les prochains jours à propos de cette opération de sauvetage de notre secteur spatial. Il est cependant une certitude : ce genre de tergiversations risque de s’avérer à l’avenir beaucoup plus risquée pour le maintien de notre position eu égard à l’arrivée des nouveaux entrants au sein de l’ESA.