mardi 24 novembre 2009

Oops! he did it...


"Touche pas à ça..." Vous connaissez la suite de cette célèbre réplique de la "Septième compagnie".

Vous verrez qu'à la lecture de ce récit vous n'êtes sans doute pas les seuls :-)

http://www.dailymail.co.uk/news/worldnews/article-1224494/Oops-Civilian-joyride-fighter-jet-pulls-ejection-switch-mistake-lands-scratch.html#ixzz0Voq4q6XP

Premiers tests moteurs pour l'A-400M



Enfin une bonne nouvelle dans ce qui constitue, depuis quelques mois, la saga A-400M.

Airbus Military a procédé aux premiers tests moteurs du transporteur stratégique. Attention, il ne s'agissait pas de réaliser un vol mais de procéder à des essais de type "dry-cranking" et "wet-cranking". En d'autres termes, les essais consistaient, dans un premier temps, à procéder à une mise en route des moteurs sans recours au kerozène mais en générant leur fonctionnant par énergie électrique. Ce n'est que dans un second temps que les moteurs furent testés avec alimentation de kerozène.

On s'en doute, le succès de ces essais moteurs aura certainement permis aux équipes d'Airbus Military de pousser un petit "ouf" de soulagement. Petit car, même si cette étape - ô combien essentielle - représente un préalable majeur à la poursuite des expérimentations, du chemin reste à parcourir avant de pouvoir envisager la mise en oeuvre opérationnelle de l'appareil. Il reste que cette nouvelle ne saurait effacer le revers subi par EADS de la décision prise par l'Afrique du Sud de renoncer à l"acquisition de l'appareil.

Très sévèrement critiqué ces derniers mois pour les retards accumulés (près de quatre années!!!) par le programme (d'une valeur de 20 milliards d'euros), EADS vient de répondre aux reproches qui lui ont été formulés. La Direction d'EADS table, par ailleurs, sur le premier vol de l'appareil avant la fin de l'année 2009. Bien qu'il est compréhensible que certains Etats acquéreurs aient demandé un geste financier de la part d'EADS (dont le chiffre d'affaire a tout de même connu une perte de 87 millions d'euros au troisième trimestre 2009), il serait un peu excessif de crier au scandale sur les retards du programme. D'une manière générale, des programmes technologiques militaires de cette ampleur sont plus enclins que d'autres à être victimes de reports. La crise financière et économique a sans doute aussi poussé certaines capitales à espérer quelques réductions opportunes d'engagement budgétaire sur le programme... C'est de bonne guerre.

Allez, un premier vol d'essai pour la Noël, j'y crois... et vous?

lundi 23 novembre 2009

Les Cahiers du RMES été/automne 2009 disponibles !

Avec un très certain retard (mea culpa), les Cahiers du RMES (été/automne 2009) sont enfin arrivés sur le site du RMES.

Venez vite les découvrir à l'adresse désormais connue : http://www.rmes.be

Bonne lecture !

Armée européenne: les risques d'une chimère


La sortie vient cette fois-ci du Ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini. Elle date du 16 novembre dernier. Dans une interview accordée à la RTBF, ce dernier remettait sur la place publique la proposition de création d'une armée européenne. Les arguments qu'il expose pour défendre la perception qu'il a d'un tel projet sont... désarmants tant ils frôlent, à dire vrai, le simplisme et la caricature. Avant de poursuivre, je tiens à faire une petite mise au point. Je suis un européen convaincu. Et c'est précisément cette conviction dans le projet européen qui m'incite à devoir dénoncer les chimères que quelques-uns se plaisent à véhiculer sur ce qui touche au projet de défense européenne. C'est au nom de cette conviction que je veux démontrer que le projet d'une armée européenne (tel que présenté)... déforce l'idéal européen. Affirmation abérrante? Voyons plutôt...

Reprenons, dans un premier temps, les arguments posés par le Ministre italien. Dans cet entretien, M. Frattini prétend que la création d'une armée européenne permettrait une meilleure coordination entre les pays membres dans le domaine militaire, notamment dans le cadre de l'opération en Afghanistan. "Si nous avions une armée européenne, affirme l'intéressé, l'Italie pourrait envoyer des avions, la France - des chars, la Grande-Bretagne - des blindés et ainsi nous parviendrons à une optimisation de nos ressources". Ma foi, c'est simple! Pourquoi n'y avions-nous pas pensé plus tôt? Quand est-ce que l'on commence?

Oui, mais voilà... une véritable armée ne repose pas sur un cocktail de moyens, basiquement additionnés. En exposant une vision aussi sommaire du projet d'une armée européenne, M. Frattini (mais il n'est pas le seul) trahit d'ailleurs une conception essentiellement quantitative - et donc quelque peu datée - de la stratégie. C'est d'ailleurs du manque d'une réelle vision stratégique que souffre, paradoxalement, une telle proposition. Le Professeur Coutau-Bégarie me pardonnera un tel raccourci mais il est utile de dire qu'une certaine approche de la stratégie implique précisément de faire correspondre les moyens à l'atteinte d'un but. Or, dans le cas de l'Europe de la défense, les moyens restent "désordonnés" et les "buts" exprimés le sont d'une manière pour le moins sibylline. Lorsque je parle, ici, des moyens, il ne s'agit pas d'évoquer la simple accumulation de ces derniers, mais bien de veiller à leur adéquation. Le mot "adéquation" est à considérer dans son acception éthymologique. Il s'agit de viser une "totalité", un "ensemble". A partir de cette acception, il est raisonnable de penser qu'un tel "ensemble adéquat" - ici, le projet d'armée - doit témoigner d'un fonctionnement coordonné dans son double principe d'existence et d'action.

Or, la "coordination" est bel et bien le noeud du problème européen, plus spécifiquement sur un sujet aussi sensible que la défense européenne. Le projet, tel que présenté, d'une armée européenne semble faire fi des variables qualitatives que sont les cultures stratégiques et techniques des pays européens. M. Frattini évoque, certes, l'objectif de coordination, mais omet d'en préciser les conditions de réalisation. L'argument culturel présente, il est vrai, des limites dans sa portée explicative des dissensus stratégiques européens. Il serait néanmoins, une grave erreur que de le déconsidérer en bloc. Je ne commettrai point l'insulte suprême de rappeler que les pays membres de l'Union européenne, restent caractérisés par des cultures stratégiques particulières. Ces cultures stratégiques, qu'on le veuille ou non, impactent, aujourd'hui encore, dans une certaine mesure, sur les choix en matière d'armement et de programmes d'acquisition. Affirmer qu'il suffit de cumuler les chars français, les blindés britanniques et les avions italiens pour optimiser les ressources est donc plus que réducteur.

Qualifier une armée d'"européenne" risquerait, par ailleurs, d'affecter les pays qui, extérieurs à l'UE, participent pourtant activement, dans la mesure de leurs moyens, aux opérations de l'Union. Nous avons, pour l'heure, des missions européennes sous bannière internationale ou, à l'inverse, des missions internationales avec des éléments européens, peu importe. Il reste que l'étiquette "européenne" risquerait fort d'altérer la visibilité des Etats qui, tout en n'étant point membres de l'UE, participent au succès de ses missions. Une armée européenne ne saurait s'inscrire dans une approche exclusive.

Autre élément à prendre à considération : la motivation réelle qui se situe derrière l'idée. Malheureusement, il est très rare que l'idéal-type d'une armée européenne soit évoqué dans un but... européen. Ce sont, le plus souvent, des considérations nationales d'ordre intérieur qui poussent les représentant de certains Etats membres à défendre le concept d'une armée européenne. Ce projet est donc rarement - voire jamais - envisagé à l'aune d'un objectif européen mais souvent mobilisé pour des raisons d'ordre interne par les Etats. Et c'est bien la perspective, erronée, d'économies budgétaires, qui se situe à la base des arguments des défenseurs d'un tel projet. Or, il est loin d'être acquis que la création d'une armée européenne - allez, admettons son existence juste pour l'exercice - puisse être facteur d'économies. L'interopérabilité des matériels, l'entraînement en commun des hommes, les impératifs de communication, la révision des calendriers de rotations nationales des moyens (oui, on oublie souvent cet aspect des choses!), supposeront plus que probablement des coûts fixes additionnels. Bref, le "retour sur investissement" ne risque pas d'être immédiat et ne collerait pas avec le calendrier des échéances électorales de nos décideurs politiques européens.

Si l'idéal-type d'une armée européenne peut - et doit - être un concept mobilisateur, il importe de ne pas oublier que la défense européenne exige avant tout des démarches pragmatiques, des logiques de construction qui prennent en considération les sensibilités les plus diverses. Bien sûr, des non-sens persistent. Et ils se révèlent extrêment douloureux lorsqu'ils peuvent entraîner des conséquences budgétaires ou, pire, affecter la sécurité des hommes sur le terrain. Il n'en reste pas moins que le fait de lancer à l'opinion publique l'idée d'une "armée européenne" comme on lance, dans le désespoir, son "va-tout" dans un jeu puisse substantiellement apporter une pierre solide à l'édifice de la défense européenne.